À votre avis, la bande en forme de V apposée sur les baskets est-elle protégée à titre de design ou de marque ? Dans ce cas de figure, il s'agit d’un type de marque inhabituel. La protection revendiquée par VANS, le fabricant de chaussures de sport, porte sur le positionnement toujours identique de l’élément figuratif sur la chaussure. On parle donc d’une marque de position.
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DESIGNS
Marque ou pas marque ?
Si la plupart des marques consistent en des mots et des éléments figuratifs, des signes moins conventionnels comme des couleurs ou des formes tridimensionnelles peuvent également être protégés à titre de marques, mais seulement à certaines conditions bien précises. Voici un tour d'horizon des divers types de marques.
Presque tous les signes susceptibles de représentation graphique peuvent constituer une marque
En plus des marques composées d'éléments verbaux ou figuratifs ou d’une combinaison de ces éléments, il existe aussi des types de marques particuliers comme les formes tridimensionnelles, les courtes mélodies comme les jingles, les couleurs, les séquences d’images ou de mots en mouvement, les hologrammes et, comme dans le cas de VANS, la position concrète de signes sur un produit.
Cela peut paraître étrange, mais en principe tout signe apte à distinguer les produits ou les services d'une entreprise de ceux d'entreprises concurrentes peut être déposé comme marque.
Plus de 99,9 % des nouveaux enregistrements sont des marques conventionnelles
Les types de marques non conventionnels font rarement l’objet d’un enregistrement : en 2018, ils représentaient moins de 0,1 % des nouvelles marques enregistrées en Suisse. 634 marques tridimensionnelles, 37 marques sonores, 15 marques de position, 11 marques de couleur et 10 marques de mouvement sont actuellement inscrites au registre suisse des marques contre quasiment 143 000 marques verbales, près de 91 500 marques verbales/figuratives et quelque 10 500 marques figuratives (source : Swissreg, 12 juin 2019).
Obstacles à l’enregistrement
Ce n’est pas sans raison si le taux d’enregistrements pour ces marques non conventionnelles est si faible. En effet, une marque est enregistrée à condition que le consommateur voie dans la forme, la couleur, la position d'un signe ou le jingle une référence à une entreprise et pas simplement une belle chaise, un jaune éclatant, une jolie décoration ou une mélodie agréable.
Lorsque le signe est dépourvu de caractère distinctif et que le renvoi au fournisseur n'est pas perçu, il est considéré comme appartenant au domaine public et il doit rester à la libre disposition de tous les acteurs du marché. En principe, les formes et les couleurs ne peuvent pas être monopolisées en tant que marques sauf si, après un usage prolongé, elles ont acquis un caractère de marque. Dans ce cas, on parle d’une marque imposée, qui requiert une utilisation intensive de la part de son titulaire, par exemple dans la publicité. Le jaune protégé pour certains produits et services de la Poste Suisse SA (RAL 1004, Pantone 116 C/109 U) est un exemple bien connu de marque imposée.
Bien choisir sa marque
Lorsque l’on crée une marque, on se concentre en général sur les types de marques courants, tels la marque verbale, la marque figurative ou la marque verbale/figurative. Décider du type de marque que l’on souhaite protéger est une question cruciale d’ordre stratégique; l'aide d'un spécialiste peut s’avérer utile. Il est recommandé de bien réfléchir à l'usage de la marque par exemple sur les produits et les emballages, sur les imprimés ou dans la publicité, puis de requérir la protection du signe en conséquence. En effet, si la marque n'est pas utilisée telle qu'elle est enregistrée, on risque de perdre ses droits.
Marque de position ou designs ?
Revenons-en à notre chaussure : La bande en forme de V apposée sur la basket aurait-elle pu être protégée aussi à titre de design ? Dans la mesure où il s'agit d’un nouveau design et qu’il est original, la réponse est affirmative. Mais marque et design se distinguent au niveau du but (et de l’étendue). Si les consommateurs sont censés voir dans la bande une référence au fabricant (« Ah ! Des baskets VANS ! »), il faut la protéger comme marque. S'il s'agit en revanche de protéger un élément visuel original et décoratif permettant à une firme de démarquer ses produits de ceux de la concurrence, c'est le design qui entre en ligne de compte, puisqu'il n'est pas question de distinguer la basket comme une chaussure de marque.
Étendue de la protection à clarifier
Les litiges portant sur l’étendue de la protection sont tranchés par un tribunal dans le cadre d'une procédure civile ou par l’IPI dans une procédure d’opposition. L’étendue de la protection des marques non conventionnelles n’a pas encore été jugée de manière définitive : l’entreprise Kraft Foods qui a protégé la couleur mauve pour du chocolat pourrait-elle par exemple interdire à un autre fabricant de chocolat d’utiliser une teinte de violet différente pour un emballage ? Comme il existe relativement peu de jurisprudence, il n'est pas possible de donner une réponse univoque à cette question.
Marques verbales, marques figuratives et marques verbales/figuratives : un aperçu
Marques verbales
Une marque purement verbale (p. ex. Breitling, ABB, 501) offre en général le champ de protection le plus étendu. En effet, la protection porte sur un terme abstrait, indépendamment de son graphisme. Il est dès lors plus facile de prouver l’usage effectif et sérieux, car une éventuelle refonte de la marque ne change rien à la forme dans laquelle elle a été enregistrée.
Marques verbales/figuratives (marques combinées)
Opter pour une marque combinée est indiqué notamment lorsqu’un terme appartient au domaine public et qu’il ne peut pas être protégé comme marque verbale. La combinaison avec un élément figuratif ou un graphisme particulier permet de le protéger comme marque combinée. Mais attention ! Utilisé seul, le terme n’est pas protégé. La protection s’applique à la combinaison des éléments verbal et figuratif (impression d’ensemble).
Marques figuratives
Les marques figuratives peuvent être utilisées et combinées de manière flexible. Il peut être judicieux parfois de protéger l’élément figuratif d'une marque combinée également comme une marque purement figurative. Il existe sinon un risque qu’un concurrent se l’approprie. Selon les circonstances, le titulaire de la marque ne pourrait entreprendre aucune poursuite du point de vue du droit des marques.